Il suffit que l’on dise « langage du corps » pour que le public comprenne lui « langage des émotions ». Or les expressions ne sont pas synonymiques. Le langage du corps est souvent présenté comme un langage émotionnel, mais c’est un postulat non démontré qui est devenu un cliché. Alors qu’il est possible de démontrer que le langage corporel est aussi un langage cognitif, qu’il l’est même davantage.
Sans parler du fait que ce qu’on appelle “langage” corporel ne relève pas toujours de l’ordre du langage !
L’autre erreur souvent commise est de penser que les émotions sont universelles et donc que la théorie sur le langage corporel est une théorie universaliste, ce qui n’est pas juste. Parce que si le langage corporel comporte une part homéostatique universelle, sa part langagière, elle, ne l’est pas.
Et puis les émotions sont d’abord des mots (joie, tristesse, peur…) simplement des mots, pas des expressions corporelles, des mots. Ces mots n’ont pour certains pas d’équivalence dans aucune une autre langue. Pensons à la solitude à deux des allemands, la zweisamkeit, le pressentiment de l’amour des japonais, koi no yokan. La forme de mélancolie particulière décrite par les portugais, La saudade. Le kilig philippin, à la fois excitation romantique et hormonale qui s’empare de celui qui est face à l’être aimé. La schadenfreude allemande, forme de joie née du malheur de l’autre qui s’empare de celui qui voit chuter celui qui était juste plus fort, ou plus puissant, ou plus populaire, ou plus… que lui.(1). Dans toutes ces situations comment se comporte le corps ?
L’intérêt de cet onglet est d’éclaircir ces questions. Ce sera possible, à une condition toutefois, celle de ne pas rechercher à retrouver ce qu’on croit déjà dans le but de renforcer nos croyances, pour ne pas s’empêcher de découvrir les apports qu’il devient urgent que nous fassions.
Éléments bibliographiques
Abiateci Jean, Le dico des mots extraordinaires, Bulletin, 2022, Ed, Papier Brouillon, France. 130 pages.