La temporalité du langage corporel par rapport au langage verbal ne correspond pas aux règles du bon sens. Cette histoire a commencé à l’Université de San Francisco dans les années 1960.
Benjamin Libet : Question anodine et réponse inattendue.
Benjamin Libet (1) se pose, une question en apparence anodine : combien y a-t-il de temps entre le moment où une personne décide de bouger un doigt et le moment où le doigt bouge effectivement ?
Il observe alors un phénomène totalement contre-intuitif et pour tout dire stupéfiant : le cerveau enverrait ses ordres trois ou quatre dixièmes de seconde avant que la personne ait conscience d’agir, trois ou quatre dixièmes de seconde avant qu’elle ait pris sa décision effective !
En fait :
– Le cerveau décide (à partir de zones infra-conscientes) ;
– La personne agit ;
– Elle prend conscience qu’elle a agi.
Évidemment, l’expérience de Libet heurte tellement le bon sens que ses résultats publiés ont d’abord été critiqués. Sauf qu’ils ont été reproduits ensuite par d’autres équipes. Il reçoit d’ailleurs le premier prix Nobel virtuel de psychologie en 2003.
La “conscience” est en réalité une prise de conscience
La communauté scientifique se rend compte que ce qu’on appelle la conscience est une chambre d’enregistrement. Elle est le dernier étage de décisions qui ont déjà été prises très profondément dans le cerveau un peu auparavant. Nous avions l’impression que la conscience était à l’origine du processus de décision, mais elle en est le dernier maillon. C’est un renversement de paradigme aujourd’hui parfaitement assumé par la communauté scientifique.
Les expériences de Benjamin Libet ont introduit une brèche dans laquelle s’est engouffré le vent de la recherche et notamment John-Dylan Haynes.
Éléments bibliographiques
(1) Libet, B., Gleason, C. A., Wright, E. W., & Pearl, D. K. (1993). Time of conscious intention to act in relation to onset of cerebral activity (readiness-potential). In Neurophysiology of consciousness (pp. 249-268). Birkhäuser, Boston, MA